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Inauguré le 12 mai 1867 par l’empereur Napoléon III, le Musée d’Archéologie nationale – alors Musée des antiquités celtiques et gallo-romaines – fête ses 150 ans.

En amont de cet anniversaire, j’avais rencontré pour Le Monde de la Bible Hilaire Multon, directeur du musée d’Archéologie nationale – Domaine national de Saint-Germain-en-Laye, et Catherine Louboutin, conservateur général, adjoint au directeur responsable du pôle scientifique. Voici l’entretien qui avait paru dans Le Monde de la Bible 217, Coexister ? Juifs, chrétiens, musulmans et qui accompagnait un superbe portfolio sur les trésors des collections du musée.

Légende : Catherine Louboutin et Hilaire Multon © Arnaud Eluère pour Le Monde de la Bible
Catherine Louboutin et Hilaire Multon © Arnaud Eluère pour Le Monde de la Bible

Le Monde de la Bible : Quand fut créé le musée ?

Hilaire Multon : Le musée des Antiquités celtiques et gallo-romaines est né d’un décret pris par Napoléon III le 8 mars 1862. Il est l’aboutissement d’une longue gestation qui a vu la considération nouvelle des vestiges matériels depuis le XVIIIe siècle et la naissance d’une discipline, la Préhistoire, dans les années 1840, sans négliger le goût personnel de l’empereur pour l’archéologie. Cela se traduit notamment par l’attention particulière qu’il porte aux fouilles des sites gallo-romains de Champlieu, près de Compiègne, ou d’Alésia. Le musée est inauguré en 1867. En 1870, 16 000 objets composent les collections. Sous l’impulsion de son directeur Alexandre Bertrand, ancien de l’École d’Athènes, il passe de sept salles d’exposition à quinze salles, trois ans plus tard, grâce à un intense travail de collecte et aux dons de personnalités et d’amateurs. En 2005, il devient musée d’Archéologie nationale. Il a fêté ses 150 ans en 2012 et il s’apprête à célébrer en 2017 le 150e anniversaire de son inauguration.

MdB : Comment célébrerez-vous cet anniversaire en 2017 ?

Catherine Louboutin : Nous y travaillons en ce moment. L’idée générale est de positionner le musée dans le paysage français de l’archéologie. Pour cela, nous nous appuyons sur son histoire et sur ce qui a diligenté sa création. Sa fondation était portée par un esprit « nationaliste » en vogue alors sur le continent européen, qui encourageait la création de musées mettant en valeur l’histoire du pays et du peuple qui l’habite. La peinture dite d’histoire et l’archéologie jouent un rôle important dans l’écriture de ce roman national. Aujourd’hui l’esprit de la présentation des collections a considérablement évolué. Une abondante littérature scientifique, ou destinée à tous les publics, offre de nombreuses images, permettant d’exclure copies et moulages pour ne présenter que des objets originaux. Le champ chronologique a été élargi, allant des plus anciens outils jusqu’aux Carolingiens. Depuis sa création, le musée a sauvegardé de nombreux objets qui, sans lui, auraient sans doute disparu. Aujourd’hui le paysage n’est plus le même. Depuis une vingtaine d’années, voire quarante ans pour certains, beaucoup de musées archéologiques régionaux ont pris une véritable ampleur, en lien avec l’essor de l’archéologie préventive. En vue de cet anniversaire, nous élaborons un Projet scientifique et culturel qui redéfinira l’originalité du musée, lieu de présentation de collections exceptionnelles de la Préhistoire au Moyen Âge, issues de l’ensemble du territoire national et même au-delà, et le rôle qu’il peut jouer en relation avec ces autres musées de territoires.

MdB : La conservation des collections rencontre-t-elle des difficultés particulières ?

C. L. : Les impératifs de conservation varient. Silex, pierres polies, céramiques ne souffrent guère d’altération. En revanche, les collections d’art mobilier paléolithique, telle la tête de la dame de Brassempouy, se révèlent extrêmement fragiles. Dans la rénovation du musée, que nous espérons, nous devrons tenir compte des exigences de conservation et d’exposition de pièces si fragiles. Le musée actuel date des années 1960, même s’il a été toiletté par petits bouts au fil des ans. Nous bénéficions par ailleurs de crédits de restauration non négligeables. Notre politique se fonde sur deux axes : l’entretien des collections pour éviter leur dégradation et une restauration plus fondamentale des pièces à l’occasion de leur exposition.

MdB : Cette collection continue-t-elle d’être enrichie ?

C. L. : La principale source d’enrichissement de nos collections reste le marché de l’art et les donations de particuliers. La politique actuelle privilégie la conservation des collectes d’une fouille par la collectivité territoriale la plus proche du lieu de découverte. Nous devrions mener une réflexion fondamentale sur la dévolution du matériel découvert par l’archéologie préventive. Quels objets ont un sens dans un musée national, quels autres en ont un dans un musée territorial ? Nous avons également à réfléchir au partage des responsabilités et missions entre ceux qui peuvent assurer une protection pérenne des œuvres, et même servir de refuge quand des difficultés surviennent sur les lieux de présentation, et ceux qui sont en droit de les exposer au plus près de leur découverte.

MdB : Être installé au château de Saint-Germain-en-Laye est-il un atout ou un handicap ?

H. M. : Il est certes avantageux d’être dans un site historique prestigieux, facilement accessible depuis Paris. Le choix de Napoléon III d’installer un tel musée dans un des plus hauts lieux de l’histoire de la Nation n’était pas anodin. Cet édifice présente bien entendu des contraintes en termes d’accessibilité, de circulation et de flux de visiteurs. Tout comme la création du musée a permis la renaissance du château par Millet au XIXe siècle, après plusieurs décennies d’abandon, nous devons accompagner sa renaissance actuelle. L’État engage 17 millions dans la restauration du monument qui appelle une refonte du discours et de la muséographie. Sachant que nous ne sommes pas un musée-château mais un musée dans un château dont l’histoire, bien documentée dans les collections publiques (archives nationales, BnF…) exige une salle dédiée associant collections et dispositifs numériques innovants.

Propos recueillis par Benoît de Sagazan

Retrouvez le portfolio dans son intégralité, qui présente une dizaine de pièces exceptionnelles, issues des collections du musée dans Le Monde de la Bible 217, Coexister ? Juifs, chrétiens, musulmans, à commander sur la boutique du Monde de la Bible.

Consulter le programme du 150e anniversaire du musée d’Archéologie nationale

Retrouvez l’actualité des musées et de l’art religieux sur ce blog

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